Skin x.

Derrière. Derrière ils étaient là. Comme des ombres chuchotant entre les arbres. Des meurtriers dont les doigts, d’une étreinte, brisaient les gorges, les dents ouvraient les artères. Des vêtements reposaient sur la berge du lac. Il faisait très froid. Quoi de plus normal en hiver ? Cependant, la neige avait fondu, et le printemps semblait prêt à revenir. Au bord de l’eau immobile, une silhouette se tenait, droite et figée, la tête levée vers le ciel d’un bleu pure. Sa main dorée caressait doucement une cicatrice plus pâle qui barrait sa clavicule, démarrant à la naissance de sa gorge pour rejoindre sa poitrine. Son corps à la peau mâte frissonna, lorsqu’une bourrasque plus glaciale que les autres gronda sur sa peau nue. Entièrement nue. Il n’y avait plus rien sur la jeune fille. Son regard vide fixait avec haine l’autre berge du lac. Pourtant elle ne comptait pas le traverser. Elle les détruirait tous, mais pas aujourd’hui, pas seule. Tendant les bras, les mains offertes, doigts écartés, elle rejeta un peu plus la tête en arrière, perdue dans sa contemplation. Personne n’était là, elle pouvait le sentir. Et même si quelqu’un l’avait épié, elle n’aurait pas caché son corps pour autant. Elle connaissait la force de ses courbes sur certains yeux, elle pouvait le lire dans les esprits des siens quand elle se transformait. Les mâles détournaient la tête, et pourtant… Elle savait qu’il connaissait leurs corps. Le sien, mais aussi celui de ses sœurs louves. De sa sœur. Que faisait-elle aujourd’hui ? Jill aurait aimé se blottir contre sa jumelle comme elle le faisait lorsque la haine, la douleur et d’autres sentiments déchirants la submergeaient. Comme aujourd’hui. Comme maintenant. Une convulsion agita sa poitrine, mais elle se redressa. Puis, avec une vivacité animale, l’adolescente plongea. Son corps décrivit une courbe harmonieuse, et pourtant, alors qu’elle allait percuter l’eau, un loup blanc prit sa place. L’eau s’envola, et l’animal fixa un instant le fond du lac. Pourtant rapidement, le canidé s’agita, nageant lentement. La colère avait pris le dessus, une fois de plus. Le monstre qui était en elle cessa de se débattre, et celle qu’elle était s’endormit. Elle était louve. Ses pensées s’estompèrent, remplacées par l’instinct. L’alpha s’oubliait elle-même. Skin aurait pu calmer ce genre de crise. Mais avant tout, Jill devait sortir de l’eau. Pourtant son corps la guidait vers l’autre rive. Efficace, souple et létal. Une image éclata dans sa tête. Un vampire. L’humaine vacillait vers ses lèvres. Le loup continua, tentant d’oublier les sentiments inconnus qui ravageaient ses entrailles. Traverser le lac. Prendre pieds sur la rive opposée. Puis trouver les vampires et les tuer. Tous. Jusqu’à ce qu’ils la tuent. Jusqu’à ce qu’elle paye enfin pour ses crimes. Pour la mort de son frère. Pour la mort de son amant. Pour la transformation de sa sœur en monstre. Pour tout. L’esprit humain se réveilla dans la tête de l’animal. Skin. Elle sentait sa présence. Elle était ici, enfin. La colère diminua rapidement. La souffrance menaça de s’éteindre, comme une flamme sous la pluie. Qui pourtant brûle encore. Jill ouvrit les yeux. Elle était tombée. La surface s’étendait paisiblement au dessus d’elle. Un instant elle envisagea de serrer les paupières et de s’endormir. Ici même. Dans le silence que lui offrait l’eau. Pourtant, en songeant à sa jumelle si près, l’alpha effectua un rapide mouvement des jambes, et brisa le miroir translucide du lac. Enfin, elle nagea vers sa sœur qu’elle percevait plus qu’elle voyait, sur la rive Quileute. Elle se dirigea vers ses vêtements qu’elle enfila d’un mouvement fluide. Ceux-ci se collèrent aussitôt à sa peau humide, mais elle n’y prêta pas attention. Ses yeux de rubis se tournèrent vers Skin.

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La vue était plutôt belle, du haut de son perchoir. Les sons de la nuit agréables à l’oreille, et le vent rafraichissant faisaient frissonner doucement Skin. Elle huma l’air, comme elle le faisait sous sa forme animale, bien que ses sens ne soient pas surdéveloppés en tant qu’humaine. Un sanglot la prit en pleine respiration ; des souvenirs enfouis lui revenaient en mémoire, là, tandis qu’elle était perchée à une quinzaine de mètres du sol, la tête tournée vers les étoiles. La jeune fille balaya la voie lactée de sa main poussiéreuse comme pour chasser cette vision. Les yeux perdu dans le lointain ciel, Skin escalada lentement encore plusieurs branches, plus fines au fur et à mesure qu’elle se rapprochait du sommet de l’immense arbre. Elle voulait toucher la lune, sa protectrice. Déterminée et le sourire aux lèvres.

Un pincement familier la fit sourire encore plus, et de toutes ses dents. Ce pincement marquait la proximité de sa sœur jumelle Jill. Oubliant tout, Skin relâcha sa prise sur le bois humide, se retourna sans perdre l’équilibre, et, en un fléchissement de jambe, sauta à bas de son arbre. Les branches lui rayaient la figure, laissant de longues trainées rouges. Pour amortir sa chute, elle prit tout de même la précaution de se raccrocher à une grosse branche, et de poser en « douceur » ses pieds sur une autre qui faisait deux fois son tour de taille. Ensuite, elle se laissa tomber au sol et parti à courir vers l’endroit où semblait se trouver sa sœur.

Skin ne tarda pas à la trouver, au bord de l’eau, totalement nue. Son corps, bien sûr, Skin l’avait toujours envié. Mais les années passées à regarder les gens dévorer sa sœur du regard lui avait apprit que ce n’était spécialement drôle… Une seconde plus tard, Jill avait plongé dans l’eau, sans un bruit, tout en souplesse, sans remous. La jeune fille observa une seconde, cinq, dix. Quinze. Vingt ! Inquiète, elle se rapprocha de l’eau, le cœur serré. Elle était prête à sauter à son tour, pourvu que l’une des personnes les plus importantes de sa vie lui revienne.

Soudain, une autre peur lui transperça le ventre. Skin venait de se rendre compte que le rivage d’en face était le territoire des vampires. Angoissante possibilité, Jill pouvait très bien décider de traverser. Pour l’amour qu’elle portait à leur frère, disparu aujourd’hui par la faute des habitants de la berge opposée. Par vengeance. Qu’arriverait-il si elle traversait ? Skin ne pourrait certaine-ment plus l’en empêcher. Il y avait une limite sur la persuasion qu’elle exerçait sur sa sœur ju-melle. Lorsque celle-ci allait si loin dans sa résolution, il n’y avait plus rien à faire. Seule elle-même le pouvait. Seule comptait sa force de détermination. Jusque là, Skin n’avait jamais douté de cette force. Et pourtant, en cet instant, son cœur battait à tout rompre. Elle priait. Elle priait pour qu’elle ne soit pas arrivée trop tard.

Si jamais Jill traversait, s’ensuivrait de terribles choses. A commencer par sa mort certaine. Ensuite par le rompement du contrat vampire/loups garous. Et peut-être une guerre. La meute serait désavantagée par la perte de leur Alpha, même si le Bêta lui succédait. On ne pouvait pas chasser de son cœur la mort d’un être si proche depuis qu’on partage ses pensées.

Skin retint son souffle, ferma les yeux et, miracle, Jill réapparu du bon côté de la rivière, trempée. Sombre silhouette qui s’extirpait hors de l’eau. Quelqu’un d’autre aurait prit cela pour quelque chose d’une beauté exceptionnelle, mais pas Skin. Elle ne voyait que sa sœur, ruisselante d’eau glacée, épuisée devant un tel combat intérieur.

Prise d’une profonde admiration et d’une envie protectrice, Skin se précipita sur elle, attendit qu’elle revêtisse ses habits, puis l’enlaça fortement, soulagée.

« J’ai eu peur. Mais je t’ai sous-estimée pas vrai ? » lui dit-elle doucement, en s’écartant d’elle.

Un petit rire échappa à la jeune fille. Un rire nerveux, un trille faible et prompt à se briser.
Les bras de sa sœur jumelle n’étaient pas un étau douloureux, mais une étreinte dans laquelle il faisait bon se perdre. La chaleur incroyable du corps de la louve près d’elle la réchauffa un peu, tandis que la sienne perçait à travers les vêtements mouillés. Un léger frisson agita son échine, et ses cheveux trempés vacillèrent, retombant de nouveau devant ses yeux. Sa sœur s’écarta d’elle, l’écho de ses mots tremblant dans l’esprit de Jill. Elle s’en voulait. Oui, elle s’en voulait de jouer à ce jeu ridicule, en mettant sa vie en jeu, parce que son esprit partait quelque part où elle ne pouvait plus le contrôler si facilement. L’alpha se testait sans cesse, cherchant à mériter réellement sa vie, alors qu’elle était coupable de deux crimes. Son frère l’avait protégé, il était mort au combat. Elle avait été incapable de se contrôler. Son amant était mort. Mais si elle trouvait réellement sa faute dans le second crime, le premier était le fruit d’un amour contre lequel elle était impuissante. Elle-même aurait fait pareil pour Aaron, pour Skin. Et elle aurait hurlé après son idiot de frère du haut des nuages s’il avait été à sa place, culpabilisant parce qu’elle l’avait protégé. Elle était un monstre et pour cela elle pouvait en vouloir aux vampires. Elle n’avait pas su se contrôler. C’était sa faute. Et pourtant aussi celle des suceurs de sang qui avaient façonné les loups-garous. Son frère était mort en la protégeant. C’était sa faute, elle était trop faible autrefois. Mais surtout celle des vampires qui avaient saigné les loups, les humains, qui avaient créé de toute pièce cette guerre ridicule.
Et elle se faisait justice, se punissant par des souvenirs, par des cauchemars, et par cette douleur qui pulsait dans son corps tout entier. Elle se faisait justice en pourchassant les vampires, mettant toute sa force au service d’un seul but, les détruire. Mais elle oubliait sa jumelle, celle qui était si liée à elle, et qui souffrait elle aussi de la perte d’un frère. Et probablement de la voir devenir folle. Jill adressa un sourire tendre à Skin. Un véritable sourire, pas un de ses rictus moqueurs. De plus, elle était infidèle à ses idéaux. Elle désirait un vampire. Un meurtrier, un assassin. Il y avait bien d’autres mots pour le définir. Curieusement, elle le désirait, tout en haïssant chacune de ses cellules. Il était beau. Certes. Intelligent, parfois tendre… Et différent des autres créatures fades. Il était une drogue, un calmant qui endormait la douleur et réveillait son esprit. Puis il partait. Et merde, elle souffrait encore plus. Il jouait avec sa souffrance si facilement. Il pouvait manipuler son cœur. Et elle s’en voulait pour cela. Tellement…

- Il semblerait. Ce n’est visiblement pas aujourd’hui que les vampires…

Le mot ne sonnait plus aussi haineux. Elle s’arrêta, levant les yeux au ciel, agacée par son propre changement. Pourquoi n’arrêtait elle pas de penser que les choses étaient différentes désormais ? Elle pouvait très bien retourner dans sa souffrance silencieuse, en ne voyant plus en Edouard qu’une proie.

- Auront ma peau. Ni jamais d’ailleurs.

Sa voix était ferme, presque agressive. Jamais ils ne toucheraient son corps, plus jamais.
Et lui… Résisterait-elle à sa beauté troublante, à son esprit vif et parfois si tendre, à leurs disputes… Saurait-elle reculer devant le désir qui lui consumait les entrailles ?

- Je suis désolée… Je ne suis pas la seule à souffrir.

Elle trembla à nouveau. Il faisait froid. Elle mourait d’envie de comprendre sa jumelle comme seuls deux loups savent se comprendre. Et c’est ce qu’elle fit. Posant un léger regard de regret sur ses vêtements, elle se transforma. Ses yeux d’ambres se posèrent sur Skin, lui demandant de devenir animale à son tour, afin que leurs pensées se fondent les unes dans les autres, et qu’elle ne soit plus qu’un être.

[ * Désolée du retard ^^' * ]

Un instant, le temps sembla s’arrêter pour elles deux. Pour retrouver l’intimité qu’elles avaient jadis, avant qu’elle n’aille s’exiler pour quelques mois en Europe. Une partie de son cœur et de sa mémoire fut rendue à Skin, qui ne se senti plus totalement seule et perdue. Mais il manquait la dernière partie, à toute les deux, pour reformer le trio qu’elles avaient été étant petites. Le chainon manquant. Shaé. Trois gosses du même âge, soudées comme les doigts d’une même main, partageant tous leurs secrets et tous leurs malheurs. Pendant ce court instant, Skin entreprit simplement de lui transmettre à quel point elle lui avait manquée, et combien son voyage hors du continent l'avait revigorée. Elle était certaine que Jill comprenait ce que ressentait, il en avait toujours été ainsi.

Se séparant doucement de sa sœur, le temps reprit son court normal, rappelant qu’elle était totalement nue et mouillée. Jill la contempla, ou plutôt regarda à travers elle, les pensées vagabondes. Skin aurait tellement aimé connaître ce à quoi elle pensait. Connaître, apprendre ses rêves, comment avait évolué sa vie en quelques mois.. Elle avait grandi. Enfin, Skin elle-même avait également grandi. Mais sa forme animale lui manquait et tous les attributs qu’ils lui apportaient aussi. Jill ouvrit enfin la bouche, dévoilant des dents blanches. Sa voix était hésitante, hasardeuse, comme si elle ne savait pas sur quel chemin elle s’engageait.

« Il semblerait. Ce n’est visiblement pas aujourd’hui que les vampires… » elle s’arrêta brusquement. Son regard changea du tout au tout, plus dur. Elle semblait déterminée. Jill cracha presque ses derniers mots « …auront ma peau. Ni jamais d’ailleurs. »

Skin soupira, amusée. Sa sœur n’avait pas changé. Ou plutôt si. Elle était plus… indécise. D’après ce que Skin venait de voir, sa volonté semblait avoir prit un coup. Et ses yeux ne mentaient pas. Un instant ils étaient doux, Skin en mettrait sa main à couper qu'elle avait déjà vu cette expression... il y a longtemps... cette expression qui avait précdé au silence froid et désespéré d'après lafin d'un amour. Une fin tragique. Que s’était-il passé pendant son absence ? Le lui expliquerait-elle ?

« Je suis désolée… Je ne suis pas la seule à souffrir.
- Quoi que tu fasses je ne t’en blâmerai jamais, tu le sais, pas vrai ? » répondit doucement Skin.

Pour toute réponse, sa sœur… triplée (OMG xD c’est trop bizarre de dire ça ><) se transforma en une magnifique louve, énorme. Elle était digne de l’Alpha, la petite sœur ! La jeune fille passa une main dans le long et soyeux pelage de la louve blanche, l’enserra de ses bras, lui planta les yeux dans les yeux. Un geste qu’elle avait prit l’habitude de lui faire lorsqu’elle était humaine et elle louve, un geste qu’elle voulait faire interpréter comme de l’affection depuis la mort de leur frère. Un geste de réconfort. Puis, après l’avoir lâchée, elle l’imita.

Deux énormes loups dans la nuit, au bord de l’eau, devant le territoire ennemi. Deux loups se dévisageant, partageant tous leurs secrets et rattrapant tous ces mois loin l’un de l’autre.

Sitôt transformée, elle sentit la chaleur la réchauffer agréablement, et le léger frisson qui courait sur sa nuque s’évanouit. Ses vêtements étaient partis en lambeaux mais autant dire qu’elle s’en foutait royalement. Jill était devenue une somptueuse louve blanche, immense. Ses omoplates saillaient, traçant des ombres en leurs creux dans la douce toison immaculée. Ses cotes qui ressortaient elles aussi, témoignant de sa nutrition bien irrégulière étaient voilées sous les poils. Quant à ses yeux, ils étaient passés d’une magnifique couleur mêlant le rubis, l’améthyste et le brun, à une teinte ambre-orangée. Elle était somptueuse, éclatante de grâce et de sauvagerie. Les mots de Skin la soulagèrent. Quoi qu’elle fasse, vraiment ? Pouvait-elle croire sa sœur ? Elle pourrait lui pardonner si Jill attaquait les vampires, d’accord. Elle arrivait à lui pardonner de se montrer égoïste et de lui donner du fil à retordre alors qu’elle-même se battait avec ses propres démons. Mais que dirait-elle lorsque Jill lui montrerait l’étendue de son tourment, ce qu’elle s’était toujours interdit de faire ? Comment réagirait-elle en comprenant que sa sœur était hautement dépendante d’un abruti de vampire, d’un de leurs innommables ennemis ? Fermant les yeux, la jeune alpha hocha douloureusement la tête, et laissa ses pensées s’évader. Elle lui laissa tout voir. Tout. Ce vampire qui l’avait poursuivi. La façon dont elle s’était arrêtée, redevenant humaine. Leur discussion. La façon dont leurs lèvres s’étaient frôlées, sans vraiment se toucher. Puis la soif d’Edouard qui s’était enfui, Jill qui l’avait suivi cette fois. Sa chute alors que tous deux étaient dans un arbre. La manière dont il lui avait sauvé la vie, en la rattrapant avant qu’elle ne touche le sol, lui brisant cependant les jambes à l’impact avec son corps de marbre. Puis leur seconde rencontre, puisqu’elle avait souhaité le revoir. Elle laissa s’évader l’amour répugnant qu’elle avait nié avant de le laisser jaillir, à contrecœur. Leur baiser. Le danger qu’il avait représenté pour elle, alors qu’ils étaient sur la plage et qu’il avait failli la mordre, la vider de son sang. Puis les paroles dures du vampire. Qu’elle le tue comme elle avait tué l’homme dont elle s’était imprégnée. Celui qu’elle avait aimé plus que sa propre vie. Celui qu’elle avait détruit. Jill s’ouvrit à sa sœur en lui montrant cette histoire que tous connaissaient, alors qu’elle aurait tant voulu la garder secrète. Mais elle continua en lui dévoilant l’amour de son meilleur ami, Aaron. Les difficultés qu’elle éprouvait à tout cacher à leur sœur. Mais Jill laissa cachée au fond de son cœur la douleur perpétuelle qui l’empêchait de dormir. La culpabilité qui la hantait toujours. La haine qu’elle ressentait envers les vampires, et envers elle-même, elle qui trahissait en aimant un ennemi. Et seulement lorsqu’elle se fut libérée de tous ses secrets, Jill rouvrit les yeux, qu’elle planta dans ceux de sa sœur. Skin la comprenait mieux que personne ici. Edouard ne savait rien d’elle. Aaron ne connaissait que la jeune fille faible qui s’effondrait chaque fois devant lui. Kathleen ne voyait que la menteuse qui rechignait à renouer avec elle. Et la meute… la meute ne voyait que la louve immaculée, meneuse droite et fière déchirée par la haine et l’amour pour une même race.

« Je suis bien trop emplie de doute pour te croire. Excuse-moi. »

Mais Skin connaissait chaque facette de son être. De la petite fille faible à la femme droite. De l’enfant moqueuse à l’alpha torturée. Elle l’avait accompagnée depuis toujours, et jamais elle ne l’avait déçue. Jamais elle n’avait non plus semblée déçue par Jill. Mais peut-être que cela changerait aujourd’hui.

« Je sais que ce n’est pas ton genre de me juger, mais … Je m’en veux. Je n’arrive pas à lutter. »

Il ne dissipait pas la douleur, mais il la faisait se sentir vivante. Il faisait plus que l’aider à tenir debout. Non, pour cela elle avait l’alcool et la haine. Edouard l’aidait à se réveiller de la torpeur teintée de folie qui avait tendance à s’emparer d’elle. Il éveillait en elle plus que de la haine. Plus que de l’affection. Il était révulsant et attirant tout à la fois. Il était l’être qu’elle haïssait autant qu’elle l’aimait. Et pour cela elle s’en voulait. Car elle n’avait pas le droit de reculer, mais elle refusait délibérément d’avancer.